LES DENTELLES
L'industrie de la dentelle se propagea à Venise au XVème siècle
et trouva vers1414 une protectrice en la personne de Giovanna Dandolo, épouse
du doge Pasquale Malipiero. Cette industrie eut une croissance si rapide qu'on
dut en corriger l'excès par la Seigneurie peu d'années après
la mort de Giovanna Dandolo,en 1426.
On voulait de la dentelle partout, pour les autels, les vêtements sacerdotaux
,les couvertures, les draps, les coussins, les rideaux, mais surtout les "baveri"
(morceaux de tissus qui protégeaient la bouche du froid),les voilettes,
les colliers et les poignets .
D'admirable facture vénitienne fut la voilette avec laquelle Zilia Dandolo,
épouse du doge Lorenzo Priuli, se présenta au couronnement en
1557, avec des bandes de voile blanc décorés de dentelles, descendant
jusqu'à terre.
On en faisait cadeaux à des commissions étrangères. Parmi
les cadeaux que recevait du roi, son mari, Marie Tudor, reine d'Angleterre en
1566 figuraient en bonne place les dentelles et broderies exécutées
à Venise. Catherine de Médicis, reine de France se fournissait
elle aussi chez les dentelliers de Venise. Dans d'autres régions partaient
ces travaux et, sous Elizabeth, fille d'Henri VIII, ils se vendaient à
Londres à des prix très élevés.
Bianca Cappello, devenue finalement duchesse de Toscane, commandait à
Venise d'innombrables travaux en dentelle pour ses voilettes, colliers, manchettes
Entre temps, le gouvernement avait été obliger de légiférer
contre ce genre de luxe, tout comme il avait essayé de lutter contre
le luxe excessif des gondoles, le luxe excessif des ceintures, des chaussures...
Mais les dames n'y prêtaient pas attention et plusieurs, au contraire
ne firent que défendre avec plus d'enthousiasme cet art. Parmi elles,
citons Maria Morosini da Mula, Marina Morosini, femme du doge Grimani, qui;
à ses frais, installa un atelier de dentelle à S. Fosca, et Vienna
Vendramin Nani, à qui Cesare Vecellio dédia en 1591 son uvre
de dessins pour broderies et dentelles intitulée "Corona".
A partir de cette époque, l'industrie de la dentelle alla peu à
peu se détériorant, subissant la concurrence des pays étrangers.
Elle fut conservée seulement dans les cloîtres des religieuses,
parmi lesquels celui de S. Zaccaria, des Zitelle, et de S. Vito à Burano
étaient les meilleurs.
Il n'est pas certain que le fameux collier fait de cheveux, que le roi Louis
XIV voulait porter le jour de son couronnement soit sorti des ateliers de Vittoria
Torre et de Luigi dalla Latte, à l'Angelo Raffaele, en 1643.
Pour raviver cet art qui avait reçu un dernier coup avec le changement
des usages nationaux et qui dépérissait de plus en plus, est apparu
en 1872, l'Ecole professionnelle de dentelle fondée par quelques mécènes
sur l'île de Burano.