CECILIA TRON
Cecilia, fille de Renier Zen et épouse de Francesco Tron était une dame charmante et une femme d'esprit que le poète local Angelo Maria Barbaro chanta et dont les charmes mirent en danger le vieux Parini, comme on peut s'en rendre compte dans l'ode écrite par celui-ci en 1787, intitulée : Le Danger. Longo rappelle dans ses Mémoires qu'elle prodiguait d'immenses trésors lors de splendides réceptions où elle accueillait les meilleures gens de son pays et du monde. Chaque souverain qui arrivait à Venise était reçu dans sa maison. Pas un seul étranger célèbre pour ses talents, ses aventures ou pour grandeur de ses titres et honneurs qui ne lui fut recommandé par lettre d'illustres personnages.
Celui qui voulait un dictionnaire universel des langues et des dialectes devait se référer à ses très brillantes traductions dans lesquelles elle savait si bien trouver les mots propres à toutes les notions, soutenant noblement les diverses manières d'écrire. Elle obtenait ainsi l'admiration des voyageurs lesquels portaient chez eux, à leur retour les éloges à l'égard d'une femme si noble, si généreuse.
Il n'y avait pas de ballerine, de cantatrice, de poète, d'aventurière, ayant soif de renommée qui ne fut accueillie et protégée par elle. Protectrice des arts et des sciences, elle était mécène des hommes de lettres et des artistes, qu'elle recevait en les flattant, leur donnant courage et facilitant leur entreprise avec les associations et leur apportant une aide financière.
De telles belles prérogatives, sans doute un peu gonflées par l'adulation dont elle était l'objet étaient obscurcies par une grande licence de mœurs. Ballerini, dans ses Lettres dit qu'elle faisait feu de tout bois et raconte l'anecdote suivante : Les ducs de Curlandie étant venus à Venise en 1784 cherchaient une loge au théâtre S. Benedetto. Cecilia Tron consentit à leur céder la sienne, moyennant le pris de 80 sequins.
Alors courut le pamphlet satirique sui suit :
" Elle est forte la Tron
Elle vend sa loge
Plus cher que sa…. " (dans le texte italien : mona , mot vénitien et assez vulgaire pour le sexe féminin)
Alors dans ce cas, s'exclama-t-on, on ne devrait pas dire qu'elle vend sa loge mais qu'elle la donne ; et son mari fut l'objet des plus grasses plaisanteries.
Nullement embarassée par la présence de son mari, la noble dame répondit :

"Vous avez raison,
parce que moi, la Trona,
ma..., je la donne".

Palazzo Tron :